L’épidémie de MPOX Note ANSTS

23 septembre 2024
MPOX

L’épidémie de MPOX Note ANSTS

La mpox (ou variole du singe) est ce qu’on appelle une zoonose virale : une maladie infectieuse transmise à l’homme par un animal et causée par le virus du même nom.

Le 13 Aout 2024, le Centre de contrôle et de prévention des maladies, CDC Afrique, a déclaré la variole du singe “urgence sanitaire publique de sécurité continentale” et le lendemain, l’OMS l’a reconnue comme étant une « urgence de santé publique de portée internationale » au titre du règlement sanitaire international (2005). Ces déclarations permettent de mobiliser des moyens et de mieux coordonner la réponse à cette épidémie. L’OMS a fait cette déclaration du fait de l’observation de trois facteurs :

  • La recrudescence rapide des cas de la variole simienne dans l’Est de la RDC,
  • La propagation des cas dans d’autres pays en Afrique et en dehors du continent
  • L’émergence d’une nouvelle souche de Mpox

Le virus du Mpox est particulièrement présent en Afrique, la RDC, pays le plus touché par le virus, ayant recensé le premier cas humain en 1970, chez un jeune garçon de neuf mois. Ces dernières années, la plupart des cas ont été enregistrés en Afrique centrale et en Afrique de l’Ouest, en particulier dans les régions rurales. Depuis des décennies. Ce virus Mpox qui est considéré comme endémique en Afrique centrale et de l’ouest, la RDC connaît des épidémies de variole, une maladie infectieuse qui provoque des lésions cutanées douloureuses, mais qui peut aussi être mortelle, en particulier chez les personnes dont le système immunitaire est affaibli. Mais cette année, le nombre de cas et de décès signalés dans le pays sont particulièrement conséquents et, pour la première fois, la transmission sexuelle chez les adultes a été un facteur déterminant. Les niveaux d’infection sont particulièrement élevés chez les femmes et les hommes qui travaillent dans l’industrie du sexe et leurs clients. La RDC qui concentre 96% des cas et 97% des décès à l’échelle du continent, elle se propage également, rapidement, passant de 7 146 cas en 2022 à 14 957 en 2023 pour atteindre en 2024, 18 737 cas de Mpox dont 541 décès ont été reportés dans au moins 12 pays africains selon Africa CDC (au 16/08/2024). RDC : 15 664 cas potentiels,

548 décès Burundi : 65 cas suspects, 103 cas confirmés, Afrique du Sud : 24 cas confirmés dont 3 décès, Cameroun : 23 cas suspects, 5 cas confirmés dont 2 décès, République du Congo : 150 cas suspects, 19 cas confirmés dont 1 décès, République centrafricaine : 223 cas suspects, 45 cas confirmés, 1 décès, Nigeria : 749 cas suspects, 39 cas confirmés, Liberia : 5 cas confirmés, Rwanda : 4 cas confirmés, Côte d’Ivoire : 2 cas confirmés, Ouganda : 2 cas confirmés et Kenya : 1 cas confirmé.

Au total, Afrique CDC signale une augmentation considérable et significative de 160% des cas de Mpox en 2024 par rapport à l’année passée. Avec un taux de létalité de près de 3% et la propagation rapide de ce nouveau variant, il est alors impératif d’intensifier :

  • Les efforts de surveillance au niveau des pays
  • La prévention et le traitement des cas pour éviter une catastrophe sanitaire et une situation épidémiologique incontrôlable de la maladie

Le virus Monkeypox (MPoXV) appartient à la famille des Poxviridae, du genre orthopoxvirus dans lequel sont également classés les virus de la variole, du cowpox et de la vaccine. Ce sont des virus enveloppés de grande taille (200 à 250 nm) dont le génome est composé d’ADN double brin linéaire avec une épingle à cheveux fermée de manière covalente aux deux extrémités 5’ et 3’, précédées de séquences répétées terminales inversées (ITR) . Son génome de 196 858 paires de bases code plus de 200 protéines. Le MPoXV est très proche du virus de la variole avec 90 % d’homologie du génome. Il s’agit du plus grand virus connu infectant l’humain ; il possède une large gamme d’hôtes et un tropisme tissulaire étendu. À ce jour, aucun récepteur spécifique de la cellule hôte n’a été identifié pour les virus du genre orthopoxvirus. L’entrée virale est principalement médiée par interactions avec les ligands de la surface cellulaire et la fusion membranaire. La réplication cytoplasmique génère deux formes de virions infectieux, le virus mature intracellulaire (VMI) et le virus enveloppé extracellulaire (VEE). La couche externe de l’enveloppe du VEE joue un rôle dans l’évasion immunitaire et la transmission au sein de l’hôte, tandis que le VMI est responsable de la transmission entre les hôtes.). Il existe deux souches génétiquement distinctes du virus de la mpox (variole du singe): la souche du bassin du Congo (Afrique centrale) et la souche ouest-africaine. Les infections humaines par la souche ouest-africaine semblent causer une maladie moins grave que la souche du bassin du Congo.

Ce virus se transmet traditionnellement « par contact direct ou indirect avec du sang, des liquides organiques, des lésions cutanées ou des muqueuses d’animaux infectés », selon l’OMS. Le contact avec des sécrétions des voies respiratoires et des lésions cutanées de personnes malades, ou des matériaux contaminés comme de la literie ou de la vaisselle, présente également de forts risques de transmission. Depuis peu, les chercheurs s’inquiètent aussi de l’émergence d’une transmission de la mpox par voie sexuelle. Elle provoque des éruptions ou des lésions de la peau, le plus souvent sur le visage, la paume des mains et la plante des pieds.

La suspicion des cas est clinique mais des diagnostics cliniques différentiels qui doivent être pris en compte parmi lesquels figurent la varicelle, la rougeole, les infections cutanées bactériennes, la gale, la syphilis et les allergies associées aux médicaments. Ainsi, il est essentiel de réaliser un diagnostic biologique pour confirmer un cas suspect et éliminer ces diagnostics différentiels.

Les prélèvements recommandés pour le diagnostic virologique initial de la Mpox selon le contexte clinique et/ ou le type de lésions observées sont les suivants :

  • Prélèvements cutanéo-muqueux : écouvillonnages et/ou biopsies de lésions cutanées (toits des lésions, exsudats, voire croûtes) et/ou lésions muqueuses (hors sphère ORL) génitales et anales ;
  • Prélèvements de la sphère ORL : écouvillonnages oropharyngés (nasopharyngés possibles) ;
  • Prélèvements respiratoires semi-profonds et profonds si signes respiratoires : aspirations trachéo- bronchiques, liquides broncho-alvéolaires, prélèvements distaux protégés, crachats induits ;
  • Liquides cérébrospinaux (LCS) si suspicion d’atteinte

Tous les prélèvements de type écouvillonnage doivent être déchargés en milieu de transport. Les échantillons doivent être conditionnés conformément aux exigences nationales et internationales et être expédiés en conséquence dans un laboratoire disposant des autorisations nécessaires. L’approche de choix pour la confirmation diagnostique est la détection du virus par biologie moléculaire.

Au plan moléculaire, la première épidémie dans le nord-ouest de la RDC est causée par ce que l’on appelait auparavant le clade 1, aujourd’hui appelé clade 1a, qui est endémique dans cette partie du pays. Cette épidémie touche principalement les enfants et se propage par de multiples modes de transmission. La deuxième est une épidémie dans le nord-est de la RDC d’une nouvelle ramification du clade 1 appelée clade 1b, qui a été détectée pour la première fois en septembre 2023 dans la ville miniere de Kamitesga au sud Kivu a l’est de la RDC. Il se propage rapidement, principalement par transmission sexuelle entre adultes.

Au cours du mois juillet 2024, plus de 100 cas de clade 1b ont également été signalés dans quatre pays voisins de la RDC qui n’avaient pas signalé de cas de mpox auparavant : le Burundi, le Kenya, le Rwanda et l’Ouganda. La propagation rapide du clade 1b et sa détection dans les pays voisins sont les principales raisons de l’alerte de portée internationale. Les clade 1a et 1b provoquent tous deux une maladie plus grave que le clade 2 et sont responsables de l’épidémie mondiale actuelle de mpox.

Il s’agit d’une situation complexe, et répondre à chacune de ces épidémies et les maîtriser nécessitera une réponse aussi bien nationale qu’internationale, globale et coordonnée.

Le tableau clinique de Mpox débute par un syndrome grippal avec fièvre, maux de tête, des douleurs musculaires, d’une asthénie et d’une éruption cutanée. Ces symptômes peuvent durer deux à quatre semaines. L’éruption se présente sous forme de cloques et peuvent siéger sur le visage, les paumes des mains, la plante des pieds, l’aine, les organes génitales. Ces lésions peuvent aussi être localisées dans la bouche, la gorge, l’anus, le vagin, le rectum avec une inflammation très étendue (proctite). Dans la plupart des cas, les symptômes disparaissent spontanément en quelques semaines grâce au traitement symptomatique. Cependant, chez certaines personnes, la maladie peut être grave ou entrainer des complications : septicémie, pneumopathie, encéphalite, myocardite, lésions oculaires.

Les personnes généralement les plus à risque de développer des symptômes graves incluent : les femmes enceintes, les enfants, les personnes immunodéprimées y compris les personnes atteintes d’une infection par le VIH a un stade avance et non traitée. Il est important de noter que les taux de mortalité peuvent varier dans différents contextes en raison de plusieurs facteurs, tels que l’accès aux soins et une immunodépression sous-jacente. Le traitement antiviral avec le Tecovirimat (antiviral approuve) permet d’atténuer la sévérité des lésions   et surtout de diminuer le taux de mortalité.

Recommandations

  • Mieux comprendre les schémas de transmission pour une réponse appropriée.
  • Faciliter l’accès aux traitements, Il n’existe pas de traitement spécifique pour l’infection par le virus du mpox. Le traitement est symptomatique et doit être optimisé autant que possible pour soulager les symptômes, gérer les complications et prévenir les séquelles à long Un antiviral développé pour traiter la variole (le tecovirimat, commercialisé sous le nom de TPOXX) a également été approuvé pour le traitement de la variole du singe en janvier 2022. Un plaidoyer pour son accès géographiquement et financièrement s’impose.
  • Décentraliser les services de laboratoire afin d’améliorer les capacités de diagnostic dans tous les secteurs (formation en capacités de diagnostic, biosécurité/bio sûreté, approvisionnement et contrôle de qualité).
  • Intensifier les efforts de sensibilisation au risque de la maladie au sein des communautés avec amélioration de l’engagement communautaire.
  • Déployer des stratégies de communication appropriée.
  • Mettre en place une stratégie vaccinale et d’immunisation : Il a été démontré que la vaccination antivariolique permet de prévenir ou d’atténuer la variole, avec une efficacité de 85 %. (Vaccination contre la variole a pris fin depuis 1980, après que la maladie a été déclarée éradiquée). Par conséquent, à l’heure actuelle, les personnes âgées de moins de 40 à 50 ans (selon le pays) peuvent être plus sensibles à la variole du singe en raison de l’arrêt des campagnes de vaccination contre la variole dans le monde entier après l’éradication de cette maladie. Deux vaccins sont actuellement utilisés contre le mpox sont recommandés par le Groupe consultatif stratégique d’experts sur la vaccination de l’OMS. Ainsi, l’OMS a engagé une procédure d’autorisation d’urgence des vaccins contre le Mpox au titre du protocole EUL ; ceci permettra aux pays a faibles revenus qui n’ont pas encore délivré leur propre approbation règlementaire nationale d’accéder plus rapidement aux vaccins. Le protocole EUL permet également à des partenaires comme GAVI et UNICEF d’acheter les vaccins et de les distribuer dans ces pays. La vaccination de masse n’est pas actuellement recommandée par l’OMS.
  • Une bonne coordination avec des stratégies politiques basées sur les principes de bonne gouvernance (transparence, réactivité aux besoins des parties prenantes, établissement d’un consensus, équité et inclusivité, efficacité et responsabilité).
  • Une riposte selon une approche régionale devrait également être mis en place pour une meilleure utilisation des ressources disponibles avec un plan d’action pour endiguer la mpox mettant en exergue la collaboration entre les différents États, les partenaires techniques et financiers, la mutualisation et le partage d’expérience

Rôles et responsabilités de L’ANSTS

  • Assister les autorités sanitaires pour l’élaboration de leur plan national de riposte pour la réponse à l’épidémie
  • Collaborer avec les académies sœurs pour une coordination et réponse sous-régionale
  • Assurer le plaidoyer avec les institutions nationales et internationales pour un meilleur accès aux tests pour le diagnostic, accès aux traitements et vaccins

Version du 5 Septembre 2024

Professeur Ndeye Coumba Toure-Kane et Professeur Papa Salif Sow, membres de la Section Sciences de la Sante de l’Académie Nationale des Sciences et Techniques du Sénégal (ANSTS).


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